• Bretagne

    Petite, j'écoutais avec curosité les anecdotes familiales et j'en redemandais. Certaines histoires me paraissaient tout droit sortir d'un roman.
    Mon père avait eu une enfance tumultueuse. Né à Paris, de personnes nées à Paris, il portait un nom alsacien auquel je me sens attachée et qui désignait tout simplement les personnes d'origine germanique, ce qui est amusant est que ma grand-mère avait également un nom de même signification, (Foucard/peuple dur, sous entendu peuple germanique) et que tous deux l'ignoraient.
    Je vois dans ces noms, mon goût pour les peuples "barbares" venus du nord, plutôt que pour la civilisation latine. Toute enfant, j'étais extrêmement attirée par l'allemand que j'allais choisir en première langue et puis au dernier moment, mon père a fait une scène, violente et incongrue. Il ne supporterait pas d'entendre parler allemand à la maison. ma mère elle-même était surprise car il y avait une méthode d'apprentissage de l'allemand et un dictionnaire allemand/français à la maison que mon père parfois consultait. Néanmoins, l'épisode était si révélateur de la souffrance subie dans les camps où  il avait été prisonnier que j'avais immédiatement supprimé ce choix et n'étais plus jamais revenu sur cette décision. Seule ma mère fut en désaccord dans cette affaire mais considérant mon attitude bloquée et irréversible, elle n'insista pas au bout de quelques jours,



    Les meilleurs souvenirs de mon père se situaient en Bretagne qui était "le pays" de sa grand-mère paternelle et où il avait été placé durant le divorce de ses parents, alors qu'il avait entre 5 et 9 ans. Il racontait comment arrivé dans la ferme familiale qui lui parut énorme et très peuplée, il avait été ravi par une abondance qu'il n'avait jamais connue. Au point qu'il se gavait sans cesse et qu'il fut plusieurs fois malade pour avoir trop mangé. Il disait sa surprise en voyant les vieilles de la maison dont aucune pratiquement ne parlait français, passer toutes leurs journées auprès des fourneaux et lui distribuer des galettes et des crêpes et même du ragoût dès qu'il le demandait quelle que fut l'heure.
     Dans la ferme, il y avait toute une bande de gosses, des cousins éloignés pour la plupart, personne ne s'en occupait vraiment au point que souvent, mon père ne savait pas quels étaient les parents de l'un ou de l'autre. Quand ils n'étaient pas à l'école, ils passaient leur temps à courir partout. Une grande liberté compensée par le fait que, parfois, on leur demandait de mettre la main à la pâte, une course, une charge à porter, une aide pour s'occuper des animaux ou des cultures, pour ramasser du petit bois ou même scier des bûches.


    Mais ça ne durait pas et on les renvoyait rapidement à leurs jeux.



    Mon père disait avoir été fasciné par toute l'activité intense de ces gens qui, lorsqu'ils ne travaillaient pas, priaient ou s'amusaient mais dormaient peu. Les vieillards, souvent d'un âge très avancé, lui avaient particulièrement paru laborieux.  Quand elles ne cuisinaient pas, les femmes brodaient ou faisaient de la dentelle ; après les travaux agricoles, les hommes sculptaient du bois, fabriquaient des outils, forgeaient. Certains jouaient d'un instrument de musique. Tous chantaient et dansaient  lors des fêtes collectives qui restaient nombreuses.

    Il avait retenu aussi le mobilier imposant, le grand lit clos où il dormait et chahutait avec d'autres gosses. Les longues tables. Le seul défaut qu'il leur trouvait, concernait l'hygiène, car les femmes s'occupaient davantage de nourriture que de nettoyage, mais autrement, le tableau qu'il dressait de cette Bretagne qu'il avait connue, était assez idyllique

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