• voisins 2

    L'autre voisin du premier était barman et serveur de restaurant chez ma tante qui logeait en priorité ses employés quand ils le lui demandaient. Ceux-ci versaient le même loyer que mes parents et tous les autres locataires. Habitaient avec lui non seulement sa femme et ses trois enfants mais aussi sa mère, sa belle-mère et sa belle-sœur.




    Cas identique pour la famille arabe du second, le père était également barman, avait aussi deux ou trois enfants, et des sœurs, et sa belle-mère au logis.





    D'après ce que j'avais pu observer, les jeunes filles ou jeunes femmes non mariées, vivaient chez leurs frères et leurs belles sœurs et assumaient en contrepartie du vivre et du couvert, les charges du ménage, de la lessive et, partiellement celles de la cuisine et des soins aux enfants, les mères de famille s'occupant en priorité des nourrissons, de la gestion générale du foyer, de la confection des repas, et aussi de leur beauté dès lors qu'elles étaient déchargées du plus contraignant. Les vieilles femmes de l'immeuble avaient des sorts variés. L'une d'elle ne faisait rien et donnait des ordres à tout le monde. Les deux autres, au contraire, semblaient travailler beaucoup sans que nous sachions si c'était là l'effet de servitudes ou d'actes volontaires.






    Au second, vivait aussi l'autre famille française. L'homme était militaire, son épouse, précédemment veuve d'un autre militaire avait deux garçons, un de chaque lit, le premier, né à Libreville, au Gabon. Cet enfant qui avait juste deux ans de plus que moi fut mon ami d'enfance et, quand il n'était pas à l'école des Frères où il passait beaucoup de temps car il y restait à déjeuner et aussi à l'étude du soir, nous jouions régulièrement l'un chez l'autre par alternance. Sa mère et son beau-père, par le fait du hasard, étaient tous deux originaires de l'Orléanais. Sa famille paternelle était normande. Chaque année, la mère et ses deux fils passaient la saison d'été en France, faisant le tour des membres des différentes branches de leur famille, de Caen à Orléans.




    Cette voisine et ma mère s'étaient liées par la force des choses plutôt que par affinités, car elles étaient très différentes. Il n'empêche qu'elles étaient parvenues à une certaine intimité qui les rendait tolérantes l'une vis-à-vis de l'autre et se muait peu à peu en affection réciproque.






    Notre appartement était donc au troisième et un couple de Juifs séfarades d'un certain âge, était nos voisins mitoyens. Sans enfants, ils étaient ceux qui avaient les ressources les plus élevées, revenus qu'ils ne devaient qu'à l'habileté du mari qui était un tailleur qui avait monté seul et sans capitaux, son commerce, pour ensuite prospérer jusqu'à pouvoir employer du personnel. C'était un homme aimable et débonnaire, coquet, réputé pour sa gentillesse comme pour son travail. Très attaché à sa femme, dont on disait qu'elle avait dû être très belle et qui restait toujours très élégante malgré son embonpoint. il lui ramenait sans cesse de petits cadeaux et, plein d'attention, veillait à la distraire d'une dépression chronique dont elle semblait affligée, et qui l'avait menée à plusieurs tentatives de suicide. Il l'entraînait le soir, à chaque spectacle ou concert qui semblait digne d'intérêt. L'appartement était tenu par un drôle de beau jeune homme grand, mince et souple, au teint ambré, dont j'étais un peu amoureuse (et je n'étais pas la seule dans l'immeuble!) originaire des îles, qui clamait en riant qu'il « n'aimait » pas les femmes car il les admirait trop pour cela. Jouant son rôle de « boy » parfois jusqu'à l'outrance, il passait la matinée à tout nettoyer méticuleusement et l'après-midi à cuisiner pour le soir et le lendemain, tout cela en chantonnant à tue-tête et en racontant des histoires drôles à sa patronne qui l'adorait. Le couple qui disait le considérer comme un fils, lui payait divers cours, dont un de claquettes. Il finissait son travail quand le mari arrivait, vers 18 h et revenait le lendemain, à 9 heures ou vers 10 h 30 car il était chargé d'assurer le plus gros du ravitaillement alimentaire. Tout en récurant l'appartement et en lavant le sol, il racontait les soirées et les nuits qu'il passait dans des dancings et autres lieux, afin de distraire notre voisine tout en se faisant plaisir. Parfois, l'après-midi, nous entendions tout d'un coup très fort, diverses musiques qu'ils passaient sur le microsillon et nous savions là, qu'il la faisait danser. Et c'était tout aussi bien des valses de Strauss, des tcha-tcha-tchas ou des bossa-novas endiablées.






     






     


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