• les cheveux de ma mère

      



    Sylvie Soukovatoff


    http://www.soukovatoff.com/archive/2007/01/02/meilleurs-voeux-2007.html



    De la petite enfance, l'on retient souvent de sa mère, des souvenirs charnels. Certains comme ceux de la tétée, de la naissance ou encore de la période foetale sont occultés, d'autres sont immédiatement présents en mémoire au moindre effort de rappel ou à la moindre analogie.



    Le film le Dalhia noir tiré d'un roman noir inspiré d'un fait divers criminel où la victime avait de très beaux cheveux noirs, m'a ainsi renvoyé l'image des cheveux de ma mère.


    Ils n'étaient pas noirs mais chatain foncé avec des reflets auburn qui jouaient dans la lumière et en dévoilaient la luxuriance. Et le qualificatif que je leur donnai spontanément, était: "sombres".


    En effet cette chevelure ne se contentait pas d'être longue, mais elle était épaisse, abondante, et se soulevait en vagues mouvantes qui recouvraient ses épaules, s'écoulaient dans le dos, tandis que des mèches folles venaient balayer sa poitrine. C'était une chevelure envahissante dont elle devait retenir sans cesse l'élan par des pinces et barrettes, des tresses et des chignons qui même serrés restaient trop volumineux.



    Pour cette raison, elle en coupait régulièrement 1 centimètre sous prétexte d'en préserver les pointes, mais surtout, elle les faisait désépaissir par la coiffeuse. Cependant, rien n'y faisait, ses cheveux résistaient et gagnaient la bataille faute d'armes suffisantes levées à leur encontre. Dans les rues populaires, ils lui valaient les sifflets des hommes tandis que des mèches sautaient hors de sa "banane" sage. 

    Cette chevelure lui valait une adoration toute particulière de mon père, athée et anticlérical, qui la brossait chaque soir selon un rituel qui avait tous les aspects du sacré.

    Et rien ne me fascinait davantage que de voir toute cette masse de cheveux renversée de l'arrière vers l'avant et tomber en large rideau compact devant son visage et jusqu'à ses genoux.


    Chaque fois que ma mère me prenait dans ses bras, tôt le matin ou tard le soir alors que sa chevelure était déployée, je venais m'enfouir le visage dans son mystère...

    Il fut cependant un matin où Maman en eût assez de nos attentions à son propos et nous revint toute légère, les cheveux courts à la garçonne. Et dans le regard tragique de mon père, il m'apparut qu'il la perdrait un jour et qu'elle lui en offrait là en riant, comme un avant-goût.


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  • Commentaires

    1
    Lundi 1er Janvier 2007 à 16:34
    CORRECTION
    merci de corriger le lien
    2
    Mardi 2 Janvier 2007 à 17:17
    voilà
    il semble que ce soit fait, merci à vous de consentir à me prêter cette image ;)
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