• Le huitième enfant, était Anna, une fille fort turbulente que l'on chercha très tôt à marier car de l'avis de tous, « l'on ne pouvait rien en faire ». C'est ainsi qu'un officier de la Marine de guerre l'ayant aperçue de loin et la trouvant très vive et enjouée, demandant à l'approcher, fut exaucé. Peu après, on lui accorda sa main avec grand soulagement. Ma tante avait une quinzaine d'année et son époux presque quarante. Elle donna cependant son plein accord et disait qu'elle n'aurait jamais pu être mieux mariée. Elle murmurait qu'il avait été un excellent amant et que c'était lui qui lui avait offert un exemplaire du kama sutra traduit en français mais qui avait été imprimé en Inde, un ouvrage aux pages toutes fines, un peu bises illustrées de fins dessins à l'encre, qu'elle garda et maintint sous son oreiller, sa vie durant . Cet homme qui ne lui avait pas dissimulé qu'il avait des aventures amoureuses dans d'autres ports, eut pour elle la qualité exemplaire de ne pas être jaloux malgré l'humeur du temps et de la laisser libre pendant ses longues absences en lui demandant cependant de rester discrète.






    Leur couple dura environ vingt-cinq ans jusqu'au décès de l'officier qui périt en mer comme il se doit.





    Sa mort la laissa en butte à sa belle-famille qui n'accepta pas le testament qui lui permettait de garder la maison, le mobilier et les sommes d'argent qui étaient pourtant sur son compte bancaire. Ma tante lutta sans parvenir à vraiment gagner. Le tribunal l'autorisa cependant, au grand regret de sa belle-famille, à conserver les bijoux, les vêtements et les bibelots ainsi que certains petits meubles considérés comme « intimes » qu'il lui avait offerts. Ce fut là un problème récurrent auquel furent confrontées plusieurs des soeurs, qui furent souvent lésées financièrement, après veuvage, et cela même lorsqu'elles avaient participé à l'acquisition des biens, comme là, où certaines sommes en banque avaient été gagnées par ma tante qui pratiquait parfois des transactions immobilières pour des tiers.








    Peu après, alors qu'elle organisait ses affaires avec une certaine aisance puisqu' elle avait toujours pratiqué le négoce, elle tomba amoureuse d'un tout jeune homme maltais d'origine chinoise qui la regardait avec dévotion. Ils se marièrent peu après au grand scandale de tous, famille et amis. Ma grand-tante avait cette fois, renversé les rôles, elle avait 45 ans et G, 20. Très rapidement cependant, les mauvaises langues se calmèrent. Manifestement, le couple marchait bien, non seulement amoureusement parlant, mais aussi matériellement, ma tante avait vendu une grande partie de ses bijoux et tous deux avaient pu ouvrir un dancing, l'Alhambra qui faisait fortune, grâce au GI car on était en pleine occupation américaine. A la fin de la guerre, le dancing brûla, sans doute, quelqu'un de mal intentionné. Et ils rouvrirent une autre boîte qui dut être fermée, non qu'elle ne marcha pas mais le couple venait de perdre au jeu tout ce qu'ils possédaient ou presque, sauf quelques bijoux qui étaient restés en coffre qu'ils vendirent pour acquérir un bar restaurant., se jurant cette fois, de ne plus miser si gros.






    C'est ce restaurant que je connus, d'autant mieux que mon père y travailla durant quelques années.


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  • Ensuite, l'ordre m'échappe mais je sais que Tante Marie, car je l'ai connue, détestait ses parents à qui elle reprochait, entre autre, ne ne pas s'être suffisamment occupés de leurs gosses, détestait ses aînés, leurs terres et leurs travaux agricoles, détestait les bateaux qu'ils soient de pêche ou pétroliers, détestait en fait l'Algérie pour toutes sortes de raisons dont entre autres des motifs socio-politiques puisqu'elle était socialiste dans l'âme. Faisant toujours cependant les choses dans l'ordre et la rigueur, elle attendit ses 21 ans pour partir en Belgique où elle trouva un travail d'ouvrière à Bruxelles, changea deux ou trois fois d'usine au cours de sa vie et finit contremaître, consacra une partie de son temps au syndicalisme, une autre à ses compagnons successifs, tous belges, et mourut très âgée, célibataire et sans enfants, alors que j'étais adulte.


    Le frère suivant ou précédent, Alphonse, la rejoignit en un parcours à peu près semblable mais plus heurté car la guerre de 14 l'appela en France pendant quelques années pour combattre. Il fut blessé comme la plupart des soldats de la Grande guerre. Une fois guéri et la guerre finie, il repartit en Belgique, troqua l'usine pour le bureau, et vécut tranquille et solitaire jusque tard.


    Un autre un peu plus jeune dont je ne me souviens plus du nom car il avait disparu bien avant ma naissance, poursuivit ses études puis entra au séminaire. Au moment de prononcer ses vœux, il changea d'avis et s'engagea dans les zouaves, partit pour l'Afrique noire où il devait périr dans une rixe en je ne sais plus quel pays.

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    Je crois que c'est le suivant qui s'engagea dans la marine, déserta et dont on n'entendit plus parller jusqu'à ce que 20 ans plus tard, mon arrière-grand-mère soit avertie de son décès par le consulat de France en Uruguay où son cadavre avait été retrouvé en piteux état. Il semble qu'il y vivait depuis un certain temps car des personnes avaient pu l'identifier.

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  • Avant de poursuivre l'histoire de ma grand-mère, il me faut d'abord conter ce que je sais de ses dix frères et sœurs.



    Les deux aînés, une fille et un garçon, qui avaient épaulé leurs parents dès le plus jeune âge prirent leur succession très tôt, allégeant ainsi leurs responsabilités. C'étaient de gros travailleurs aux goûts sobres qui avaient épousé, jeunes encore, des espagnols qui habitaient non loin, tout aussi besogneux et austères, d'autant plus que critiqués par leurs parents comme pas leurs beaux-parents qui criaient tous à la mésalliance, ils devaient faire leurs preuves. Les deux couples eurent chacun, deux ou trois enfants, qui n'en eurent pas davantage, voire juste un seul, mais les générations se succédant rapidement grâce à des mariages précoces, c'était là une vraie dynastie que je rencontrai enfant, une fois l'an, autour d'un banquet.



    Le Troisième n'aimait rien faire sinon des balades en mer où il emmenait sa maman dont il était le préféré, et qui pouvait ainsi s'adonner à son activité préférée, la pêche.



    Laissant toutes les décisions à ses frère et sœur, il les aidait cependant lors des gros travaux saisonniers et même quotidiennement à différents postes, tout en se laissant le droit de refuser quand il avait autre chose à faire qui lui plaisait davantage.

    En contrepartie de sa main d'œuvre, il mangeait à la table familiale, possédait son petit cabanon de deux pièces, construite de ses mains (sans doute avec l'aide de tt le monde) sur les terres familiales, était approvisionné en nourritures de base pour dîner seul quand il en avait envie, et recevait quelque argent de poche pour ses cigarettes, son journal quotidien, son anisette au café du coin et ses courses en ville. Après avoir été réputé pour être un don juan impénitent, il cessa de courir l'esguillette, comme il disait, dès la trentaine, se contentant pour tout loisir de se promener en mer et de méditer dans le « jardin aux fleurs », ravissant parc pentu caché par une ligne de roseaux et auquel on accédait par quelques marches au détour d'un champ de vignes, il avait été créé par l'un de ses neveux qui avait étudié l'horticulture et le paysagisme et l'avait planté d'essences tropicales, de toutes sortes de plantes grasses, de massifs fleuris qui embaumaient, d'un kiosque, d'un bassin au centre duquel s'élevait une fontaine,  et de bancs de ciment lisse orné de mosaïques.

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